Ratonnades d’octobre 61 : Le sang comme écran de fumée
Ratonnades d’octobre 61 :
Le sang comme écran de fumée
Alexandre Gerbi
Il y a cinquante ans hier, les ratonnades du 17 octobre 1961 ensanglantaient les rues de Paris et rougissaient la Seine, sous le haut patronage de Charles de Gaulle.
Pourquoi Charles de Gaulle donna-t-il l’ordre à Maurice Papon, préfet de police de Paris, de procéder à cette répression ultraviolente ?
Officiellement, pour contrer une manifestation pro-FLN, parti indépendantiste algérien, dont le gouvernement de Charles de Gaulle était en principe l’adversaire.
Voici qui semble fort logique… Et pourtant…
A la même époque, le même Charles de Gaulle intensifiait, dans le plus grand secret, sa politique d’alliance avec le FLN. Politique qu’il poussera d’ailleurs à son terme quelque huit mois plus tard, en livrant l’Algérie, Sahara compris, au parti indépendantiste. Alors même que le FLN était vaincu militairement, et connu pour ses méthodes particulièrement barbares (voir par exemple le massacre de Melouza, en 1957), en particulier à l’endroit des Algériens profrançais ou pro-MNA, parti également indépendantiste, mais concurrent, dirigé par Messali Hadj. D’ailleurs, l’Algérie devenue indépendante connaîtra rapidement un gigantesque bain de sang, où des dizaines de milliers d’Algériens, Harkis ou civils profrançais et leurs familles, seront massacrés dans des conditions souvent atroces.
Alors pourquoi Charles de Gaulle a-t-il donné l’ordre de réprimer aussi cruellement une manifestation -interdite - organisée par ses alliés ?
En réalité, les ratonnades du 17 octobre 1961 visaient, pour de Gaulle, à se donner de lui-même, aux yeux de l’opinion publique française, l’image d’un chef politique intraitable avec le FLN, afin de mieux cacher qu’il traitait avec lui, en en faisant son interlocuteur exclusif, et ce au détriment aussi bien du MNA de Messali Hadj que des Pieds-Noirs et, surtout, des millions d’Algériens profrançais.
Autrement dit, les ratonnades du 17 octobre 1961 s’inscrivent dans la liste presque sans fin des diversions qui permirent à Charles de Gaulle, en l’espace de quatre ans (1958-1962), de mener à bien son projet monstrueux : trahir de A à Z ses engagements de 1958, et procéder au démantèlement de l’ensemble franco-africain. Afin d’éviter la « bougnoulisation » (et l’islamisation…) de la France et, d'autre part, d’organiser le néocolonialisme.
Il est donc bon de commémorer les tragiques événements d’octobre 1961. Non seulement au nom des hommes qui perdirent la vie ce jour-là. Mais aussi parce qu’à travers ce qui fut une habile manœuvre d’intoxication de l’opinion publique, c’est la stratégie machiavélique de Charles de Gaulle, ses trahisons et ses mensonges, qui s’illustra alors.
Et qui s’illustrera de nouveau, de façon également radicale et affreuse, le 26 mars 1962 : ce jour-là, rue d’Isly à Alger, c’est cette fois la foule pied-noire qui fera les frais de la stratégie et des méthodes criminelles de Charles de Gaulle : l’armée fera feu à la mitrailleuse, pendant dix minutes, sur la foule manifestant pourtant pacifiquement son soutien à Bab-el-Oued, quartier populaire d’Alger pro-OAS insurgé contre l'indépendance et, pour cela, en état de blocus. Bilan : une cinquantaine de mort et des centaines de blessés. Manifestation, il est vrai, interdite, tout comme celle d'octobre 1961...
Plus encore que les ratonnades de 1961, cet événement, appelé pudiquement « fusillade de la rue d’Isly », fait l’objet d’une large omerta médiatique qu’il est grand temps de briser.
Rendez-vous en mars 2012, pour le cinquantenaire de ce tragique événement. Voir si les médias et les associations de tous bord sauront ne pas faire le tri entre les victimes d'une Histoire délirante...
Libellés : 1961, algérie, charles de Gaulle, cinquantenaire des indépendances, france, harkis, octobre 61, papon, paris, ratonnades
2 Comments:
Excellent billet… un éclairage sur le comportement de DeGaulle, criminel compulsif… Du 17 octobre 1961 à Paris au 26 mars 1962 à Alger puis au 5 juillet à Oran il y a une profonde cohérence… le goût du sang… le goût de la division des Français… la haine des « bougnoules », FLN et Harkis confondus, autant que des Européens d’Algérie… Chaque fois il s’agissait de créer l’irréversible… dans une délectation sénile criminelle de soldat raté.
Aussi je ne partage nullement l’opposition de certains aux manifestations marquant cet anniversaire du 17 octobre, notamment à Nice… La lucidité à l’égard du personnage DeGaulle doit primer. En dépit des divergences passées une solidarité entre les victimes, toutes, toutes autant haïes que flouées par cet ignoble personnage doit l’emporter.
Le tribunal de l’Histoire défalsifiée doit être aussi serein qu'impitoyable.
http://chardon-ardent.blogspot.com/
Le commentaire de Chardon Ardent recoupe le témoignage de l'Algérien Rahim Rezigat sur RFI (En sol majeur, 17 octobre), pour ce qui est de l'ostracisme envers les harkis et le FLN confondus, du fait de la politique de de Gaulle, spécialement même envers les harkis, d'après ce que j'ai pu comprendre.
Cordialement
Enregistrer un commentaire
<< Home