6 août 2010

Sarkozy, BHL, la gauche française et le reste du monde ou Les grands prêtres du désastre



Sarkozy, BHL, la gauche française

et le reste du monde


ou

Les grands prêtres

du désastre





par


Alexandre Gerbi

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L'élection de 2012 sera marquée par une poussée sans précédent du Front National (FN). En tout cas, c’est ce que doit penser Nicolas Sarkozy, qui joue la carte de l’extrême-droite avec une force jamais vue. En dehors du gouvernement et des sphères lepéniste, nationaliste ou « identitaire », tout le monde s’accorde à reconnaître la proposition de déchéance de la nationalité comme monstrueuse, puisqu’elle revient à créer deux catégories de citoyens…

De la sorte, Nicolas Sarkozy n’est sans doute pas sûr de contenir l’hégémonie du FN sur sa droite ; peut-être risque-t-il même de l’accentuer. Mais il peut espérer, presqu’à coup sûr, gagner par l’écrasement de la gauche. En effet, en sortant la grosse artillerie ultra droitiste, il se donne les moyens de mettre en évidence l’indigence, la nullité, les impasses de la pensée du PS et des autres partis de l’opposition sur la brûlante question « immigration/insécurité », et surtout leur hypocrisie totalement déconnectée. De la sorte, Sarko espère tirer parti d’un contexte où l’électorat s’aperçoit comme jamais de l’immense péril des banlieues. Car malgré l’ampleur de la manipulation médiatique qui occulte depuis des lustres, autant que faire se peut, à la fois l’ampleur du danger et l’effarante situation où se trouve le pays, nul n’ignore aujourd’hui que des centaines de « cités » ou de « quartiers » sont sujets à l’ultraviolence, à l’obscurantisme politique et religieux, sur fond de haine de la France.

Quand le crime se greffe sur l’idéologie

Or, par bonheur, à l’heure qu’il est, toute la banlieue n’est pas entièrement frappée par les trois formes du péril. Une importante partie de la banlieue, y compris celle d’origine immigrée, résiste à ces diverses tentations. Malheureusement, l’idéologie officielle et plus généralement la structure politico-médiatico-intellectuelle française, issue de la Ve République blanciste en ses métamorphoses, est incapable de lui tendre la main, parce qu’elle est incapable de répondre à une crise dont le fondement est bien davantage idéologique (et non pas culturel, contrairement à ce que disait récemment Xavier Lemoine, maire UMP de Montfermeil) que social. Quant au crime, il se greffe simplement dessus, et y puise sa force, mise au service de ses trafics… Quoi qu’il en soit, le phénomène atteint un tel degré de développement que Bernard-Henri Lévy lui-même, dans une récente tribune dans le Monde, concède que « la guerre civile menace ». Et le « philosophe » de pointer les « trois erreurs de Nicolas Sarkozy ». A coup sûr, les innombrables fautes de BHL, dont l’ignoble Idéologie française (Grasset, 1981) et par la suite les intimes collusions et autres accointances avec le Système, de l’apologie de Sartre à celle de de Gaulle, des officines littéraires aux milieux d’affaires en passant par les réseaux et la police de la pensée, ne sont pour rien dans les malheurs actuels du pays…

Or précisément, pour endiguer la montée du danger et contrer l’avènement du désastre, il faudrait remettre en cause les fondements mêmes du régime qui l’a engendré. Il faudrait revenir sur les fonts baptismaux de la Ve République, à savoir le largage de l’Afrique et de ses populations, leur mise à distance et leur mise à l’écart, ce que nous avons appelé ailleurs l’apartheid gaullien, que permit la prétendue « décolonisation ». Il faudrait, pour ce faire, commencer par démystifier (démythifier) la figure du général de Gaulle, dont BHL comme Nicolas Sarkozy sont, justement, de grands thuriféraires. Il faudrait avouer le cauchemar atroce (ces mots sont pesés), tissé de trahisons extrêmes et de mensonges suprêmes, dans lequel un dangereux pervers nommé Charles de Gaulle fit, avec l’aide des Etats-Unis puis de l’Union soviétique, basculer l’Afrique et la France, et partant le monde, il y a cinquante ans. Las ! Allumer la télévision ou lire la presse française en l’an 2010 n’incite guère à penser que le déboulonnage de l’idole soit à l’ordre du jour…

Opportunisme sarkozyen

Alors Nicolas Sarkozy, entre son défilé africain du 14-Juillet sur les Champs-Elysées et ses trois semaines de vacances au Cap Nègre, s’en remet à l’idéologie officielle du régime. Il pose en demi-Français les Français d’origine dite « étrangère », alors que la plupart de ceux qu’il vise sont, de fait, originaires d’anciens territoires français, en particulier d’Algérie. Territoires qui furent délibérément abandonnés par le gouvernement du Général-Président il y a un demi-siècle, après moult mensonges et moult reniements. Pour éviter, à coups de massacres et d’assassinats, la « bougnoulisation » (sic) de la France, mais aussi pour organiser le très lucratif néocolonialisme.

Avec les affabulations complexes qui permirent de les tenir cachés, ces deux axes de la décolonisation, l’un secret, l’autre officieux, constituent trois sources majeures de la crise française qui se cristallise dans la crise des banlieues et de sa jeunesse, mais mine en réalité de fond en comble le pays tout entier. Car le largage « anti-bougnoulisation » fut, en plus d’une trahison des principes les plus hauts de la République, une mise au ban et une immense marque de mépris à l’égard des citoyens africains ; le néocolonialisme, une autre marque de mépris assortie d’un cynisme sans bornes à l’égard des Ultramarins, comme l’occasion d’une rapacité obscène ; le mensonge qui enroba le tout consista en un bourrage de crâne visant à détourner les Africains et les Maghrébins de la France, tout en leur donnant à croire que l’indépendance, le divorce étaient leur fait absolu. Ce dernier point, orchestré par une propagande internationale et planétaire (USA, URSS, Chine, Vatican, Ligue Arabe, etc.), a tellement bien fonctionné que toute la jeunesse française, en particulier celle des banlieues, croit, contre toute raison, que l’indépendance fut arrachée par les Africains, dont ils déduisent qu’ils n’aimaient pas la France, voire qu’ils la détestaient. Et ces jeunes et moins jeunes se réclament de leur exemple quand ils crachent sur la France, l’incendient, la mettent à sac ou la terrorise…

Rompre avec l’Histoire officielle

Si l’on veut espérer désamorcer la « haine » qui prospère en banlieue, il faut d’abord cesser d’instiller des mensonges criminels, des amnésies dans la tête de la malheureuse jeunesse. Lever ce qui bloque l’intégration et, pire encore, provoque un effet de « désintégration » – les jeunes des banlieues françaises sont, en moyenne, bien plus hostiles à la France que ne l’est la jeunesse des pays dont ils sont originaires. Voilà qui devrait clouer le bec à tous ceux qui invoquent je ne sais quelle origine « culturelle » à ces malheurs que nous connaissons. Mais pour en sortir, cela supposerait de rompre avec le système idéologique aux sources de ce phénomène, en particulier l’Histoire mensongère dont il se nourrit.

Rompre avec l’idéologie et l’histoire officielle du régime, ce serait aussi rompre avec l’inégalité qui fonda la Ve République après l’assassinat de la Révolution de mai 1958 et la destruction de l’unité franco-africaine, au gré de conceptions inacceptables de la francité, à des fins néocolonialistes comme on l’a vu et, en outre, selon des voies totalement illégales. Le gouvernement actuel, à l’instar de ses prédécesseurs giscardiens, mitterrandiens ou chiraquiens, affirme avoir déjà accompli cette révolution copernicienne. Les récentes menaces sur la nationalité brandies par Nicolas Sarkozy achèvent de démontrer, si l’on en doutait, que rien n’est moins sûr…

Ces choses ne sauraient surprendre, puisque pour rompre avec l’inégalité et le néocolonialisme à l’origine de la plupart de nos maux, rompre avec les mensonges de l’Histoire impliquerait, d’abord, de mettre en lumière les fondements du Système qui nous a conduits jusqu’ici. Or on ne le fait pas. Bien au contraire, à droite comme à gauche, chez Nicolas Sarkozy ou Bernard-Henri Lévy aussi bien que du côté des socialistes, des communistes ou des Verts, sans rien dire des trotskystes infiltrés un peu partout, on persiste à nier l’Histoire occultée de la décolonisation franco-africaine, tout en se prévalant perpétuellement d’un confortable antiracisme de salon. A telle enseigne que jamais le moindre bémol n’est apporté au panégyrique permanent et polymorphe dont la figure de Charles de Gaulle fait l’objet, en dépit de tout ce qui devrait, pour le moins, inspirer quelque modération. Au contraire, chacun y va de son petit couplet extatique ou, les jours modestes, laudateur. Jusqu’à Marine Le Pen.

Il est grand temps, pourtant, que la vérité soit dite. Car après l’Afrique, la France menace de succomber aux mensonges, de se déchirer sous le souffle délétère de l’absolu crime d’Etat qu’accomplit le général de Gaulle, avec l’aide de ses alliés de tout bord, entre 1959 et 1962.

Mais pour expliquer tout cela, pour ouvrir une si gigantesque et vertigineuse boîte de Pandore, il faudrait beaucoup, beaucoup de temps, beaucoup, beaucoup de patience et surtout beaucoup, beaucoup d’humilité et de grandeur d’âme. Toutes choses qui font cruellement défaut au Système autant qu’à ses grands prêtres, tels ci-devant Nicolas Sarkozy, Bernard-Henri Lévy et la sinistre gauche française. Et le reste du monde.



Alexandre Gerbi




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1 Comments:

At 16/8/10 00:06, Blogger Sophie de Clauzade said...

On pourrait ajouter aux libellés de ce blog, "jeunes", société, banlieues...

 

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